Songe d’une nuit d’été
A 4h30 l’Equipe de France défie les Etats-Unis en finale des Jeux Olympiques. 13 jours après avoir battu les stars NBA, les Bleus veulent croire à un nouvel exploit.
1948, 2000 et désormais 2021. Trois finales olympiques. Trois France-Etats Unis.
Au sortir de la guerre, les Bleus avaient encaissé un terrible -44 terminant à 7 sur 67 aux tirs (21-65). A l’entre-deux initial, René Derency (1,91 m) s’était présenté face à Bob Kurland (2,13 m), un des premiers dunkeurs de l’histoire pour qui la règle du goaldtending (interdiction de contrer en phase descendante) avait été inventée. Les joueurs avaient découvert un basket à des années lumières de celui qu’il pratiquait dans le championnat de France. "J’ai eu l’impression de jouer au sous-sol alors que les Yankees étaient au premier étage. Tout se passait très haut au-dessus de ma tête", souriait René Chocat.
52 ans plus tard, l’Equipe de France, miraculée après une phase de poule ratée, était passée à deux doigts de réaliser l’exploit du siècle face à Kevin Garnett, Ray Allen, Alonzo Mourning ou Jason Kidd. Menée 56-72 à huit minutes de la fin, les Bleus se lâchent et lorsqu’Antoine Rigaudeau fait mouche à 6,25 m le Roi retourne vers son banc le poing rageur et les yeux fous. L’inimaginable devient possible. Le fantasme à portée de mains. "Rudy Tomjanovich était blanc comme un linge", se souvient Jean-Pierre de Vincenzi à propos du coach double champion NBA avec les Rockets. Revenus à -4 deux rebonds offensifs abandonnés et des pertes de balle tricolores décident du sort du match (75-85). "J’ai découvert ce jour-là ce qu’était la peur de gagner", sourit JPDV. "Ai-je pensé qu’on allait les battre ? Sur un malentendu, oui…"
21 ans plus tard pas besoin d’avoir 12 Jean-Claude Dusse sur le parquet de la Saitama Super Arena. La NBA, qui accueillait 13 joueurs français cette saison, n’est plus si lointaine. Et si les Américains sont toujours les immenses favoris du tournoi, l’Equipe de France restent sur deux victoires consécutives face à Team USA. En quart de finale de la Coupe du Monde 2019 puis lors du premier match de la phase de poule. "C’est moins impossible", souriait Nicolas Batum en réponse à une question sur les perspectives de dominer les stars US. "Tu peux renverser un titan", ajoute Evan Fournier. "Quand on regarde l’effectif bien évidemment ils nous sont supérieurs. Mais est-ce qu’on peut les battre ? Est-ce qu’on a un vrai savoir-faire ? Bien sûr."
Les Bleus ne se présenteront pas en victime expiatoire déjà ravie d’avoir atteint ce niveau de la compétition. "Le rêve c’est de gagner les Jeux Olympiques contre les Etats-Unis", insiste Fournier, qui sait également que l’équipe qui se présentera face à lui n’a plus grand-chose à voir avec celle battue le 25 juillet dernier. "Je ne les ai pas regardés mais rien qu’au niveau physique… Moi j’ai mis une semaine avant de dormir. Et plus les matches passent plus ils prennent du rythme." La République Tchèque, l’Espagne et l’Australie ont résisté une mi-temps avant de prendre l’eau dans les 20 dernières minutes : -31, -14 et -22 sur la période ! La profondeur de banc américaine est sans égale, son adresse spectaculaire et la présence de Kevin Durant dans ses rangs (25,0 pts de moyenne sur les trois derniers matches) lui assure de résister à n’importe quel temps faible. "Il va falloir inventer un chemin et il sera différent de la dernière fois", prévient Vincent Collet.