Bromance en bleu
Depuis plus de 20 ans, Pascal Donnadieu (assistant coach) et Nicolas Barth (kiné) partagent tout sur le banc de Nanterre 92. Une amitié indéfectible qui s’est prolongée en Équipe de France.
Au dîner. Sur le balcon de la Villa Navarre. A la salle de sport. Dans les couloirs des hôtels. Ils poursuivent les conversations qu’ils mènent déjà toute la saison avec Nanterre 92. Un vrai binôme qui entamera, à la rentrée dans les Hauts-de-Seine, sa 22e saison à marcher main dans la main.
Pascal Donnadieu (59 ans), l’inamovible entraîneur nanterrien, a vu débarquer, Nicolas Barth (51 ans), kinésithérapeute de son état, alors que le club évoluait en Nationale 1 et commençait à étoffer son staff. Débauché du club féminin de volley, alors en deuxième division, Barth, l’amoureux du rugby, se laisse rapidement séduire par un sport mais aussi un entraîneur avec lequel il partage une certaine idée de la vie. Un coup de foudre, ou presque. "Ça a tout de suite matché. Je suis entier, bon vivant, travailleur et beaucoup dans la relation humaine", explique-t-il. "Et Pascal est à la pointe du management pour te mettre mentalement dans les meilleures conditions pour que tu sois le plus performant dans ton domaine." Ensemble, ils vont partager tous les succès de Nanterre : 2 Coupes de France, 2 Coupes d’Europe, 1 titre en Pro B et 1 titre en Pro A.
A l’été 2014, les compères vont rajouter une période estivale à leur parcours commun. Dans l’optique de la mise en place attendue des fenêtres FIBA pour se qualifier à l’EuroBasket et à la Coupe du Monde, Donnadieu se voit confier une Équipe de France A’ qui verra passer dans ses rangs Vincent Poirier, Lahaou Konate, Yakuba Ouattara, autant de joueurs plus tard promus chez les A. Et pour l’accompagner en Corée du Sud puis en Chine, il emmène Barth dans ses bagages, obligeant ce dernier à de nouvelles adaptations pour continuer à faire fonctionner son cabinet de Levallois : "J’attaque à 7h30 et avec les entraînements de l’équipe, je finis à 19h30 tous les jours de la semaine. Et le week-end ce sont les matches. Avec l’équipe nationale tu rajoutes 6 semaines de basket. Tu imposes ça à ta femme et tes enfants. Quand tu lui expliques, chérie écoute, je vais aussi partir l’été, il faut que madame soit costaud." D’autant plus que trois ans plus tard, les A viendront toquer à sa porte. Ensemble. Toujours. "Mais je ne suis pas intervenu. Ses compétences ont fait qu’il est en Équipe de France", insiste Donnadieu. "Au-delà de cette histoire d’amitié, on sait faire la part des choses et nous sommes un duo qui a toujours bien fonctionné dans le travail. Nous sommes tous les deux des compétiteurs et on essaye dans nos domaines respectifs de repousser nos limites. C’est ce qu’on a fait à Nanterre."
En cours de préparation, les Bleus auront eu droit cet été à deux courtes périodes de break. Une première de trois jours, après la rencontre de Montpellier face au Monténégro, pendant laquelle Barth et Donnadieu se seront accordé 72 heures de pause dans leur histoire. Contraints et forcés ou presque. "Nos femmes imposent une petite séparation mais on s’appelle tous les jours", se marre le kiné. "C’est limite viscéral. Quand on est loin l’un de l’autre, on se manque. On a les mêmes visions sur l’éducation des enfants, la politique, l’économie. Et puis on se marre tout le temps." L’humour comme fil rouge. Ou le foot. Samedi soir, avant de partir pour le Japon, ils auront ainsi passé leur soirée libre au Parc des Princes, avec d’autres membres du staff. Car le couple sait ne pas être exclusif.
Lundi matin, ils sont partis vers l’Est et l’Asie, un continent qui les a déjà vu conquérir une médaille de bronze à Pékin (2019) et une médaille d’argent à Tokyo (2021). Une nouvelle étape d’une aventure qui prendra partiellement fin dans un an avec le retrait annoncé de Pascal Donnadieu du banc de Nanterre 92. "Je ne te cache pas que c’est une grande appréhension", souffle Nicolas Barth. "On vit des choses de dingue ensemble. C’est comme si tu avais fait l’Indochine et la guerre d’Algérie avec quelqu’un. Tu ne te parles même plus. Tu te regardes, tu sais tout de l’autre. C’est une relation de frères." Deux inséparables qui savourent chaque jour leur chance d’avoir touché du doigt ce que le basket français propose de plus prestigieux. "Lui comme moi sommes partis du bas de l’échelle. Quand tu te dis que tu joues par exemple une finale olympique et que tu as la chance de vivre ça avec un ami, ce n’est que du bonheur", conclut Pascal Donnadieu.