BG de Géorgie
Dans quelques semaines, Bryan George (34 ans), assistant vidéo de l’Équipe de France, va débuter une nouvelle vie en devenant Directeur de la cellule DAV (développement, assistanat, vidéo) des Atlanta Hawks, en NBA.
Certains voient leur vie basculer au Barclays Center lorsqu’ils entendent leur nom appelé à la cérémonie de la draft. Pour Bryan George, sa trajectoire aura changé lors d’un appel téléphonique sur le parking de l’Astroballe, un soir de finale LFB entre l’ASVEL et Villeneuve d’Ascq. Au bout du fil Quin Snyder, ancien coach du Utah Jazz, nouvellement en charge des Atlanta Hawks, lui confirme qu’il rejoindra son staff à la rentrée. Une annonce qui le plonge dans un maelstrom de sentiments. La joie d’intégrer la ligue la plus prestigieuse au monde. La gêne de laisser derrière lui un club où il dispose d’encore trois ans de contrat et un propriétaire, Tony Parker, qui a "beaucoup compté dans ma vie." Alors qu’il a manqué la première mi-temps à discuter des détails de son nouveau poste, George monte dans la loge présidentielle confirmer à l’ancien meneur des Spurs que son rêve NBA vient de se concrétiser après un processus de recrutement étonnamment rapide.
Comment celui venu tardivement au basket à Kourou, en Guyane, et qui a décroché un BTS dans l'étude des systèmes d'air conditionné a-t-il pu convaincre les Hawks de lui ouvrir leurs portes ? "J’ai travaillé plutôt sur ma progression individuelle que sur un objectif de NBA", répond l’ancien entraîneur de Nanterre, champion de France U15 en 2018 avec sous ses ordres Victor Wembanyama. Après un DE obtenu dans les Pays de la Loire, Bryan George termine major de promotion 2016 du diplôme d’assistant vidéo mis en place par la FFBB. Une réussite qui lui offre la possibilité d’effectuer le Tournoi de l’Amitié U15 avec la génération 2001 (Timothé Crusol, Milan Barbitch, Romain Ducote). Un an plus tard, improbable concours de circonstances, alors que, à la recherche d’un poste dans une équipe de jeunes, il échange avec Nicolas Absalon, assistant vidéo de l’Équipe de France, ce dernier lui annonce son départ et lui propose de lui succéder pour la campagne de l’EuroBasket.
Son nouveau statut chez les Bleus lui permet de passer un cap : assistant vidéo de Pascal Donnadieu à Nanterre, assistant de Laurent Vila à Pau-Orthez puis assistant à l’ASVEL. Des nouvelles prérogatives qui l’ouvrent également à l’univers NBA, en devenant un contact précieux pour les scouts à la recherche d’informations sur les prospects français. "Ils m’ont débloqué l’esprit en me disant que c’était possible", estime George à propos d’un projet américain qui commence à prendre forme dans son esprit. "J’ai essayé de faire jouer le retour d’ascenseur via les scouts pour intégrer une équipe à la summer league de Las Vegas en 2022. Mais rien ne s’est concrétisé. J’y suis quand même allé comme scout de l’ASVEL et les Wizards et les Clippers m’ont permis d'assister à leurs entraînements."
Les premiers jalons sont posés. Et les événements vont s’accélérer lors de la saison suivante. Un scout australien qui travaille sur l’Asie évoque avec Bryan George des opportunités de coaching dans la région. Sans pour autant qu’une proposition ferme ne soit formulée. Quelques semaines plus tard, par l’entremise de Jonathan Givony, gourou de la draft pour ESPN, c’est un contrat bien concret pour une place d’assistant dans une université américaine qui termine dans ses mails. Mais dans une NCAA qui cherche à exploiter le filon des talents européens, l’offre a sans doute plus à voir avec l’idée de mettre sur pied une filière de recrutement que d’exploiter ses compétences d’entraîneur. "C’est ce côté qui m’a refroidi", expose George, qui ne donne pas suite.
L’opportunité NBA va se matérialiser dans la foulée. Benas Matkevicius, scout des Boston Celtics, assistant en équipe nationale lituanienne et qui a travaillé avec Quin Snyder au CSKA Moscou lorsque ce dernier y était assistant d’Ettore Messina, souffle le nom du Français à celui qui vient de signer un contrat de cinq ans avec les Atlanta Hawks. L’ancien guide du Jazz se renseigne auprès de Boris Diaw, de l’agence Comsport, avant de demander l’autorisation à Tony Parker de contacter son employé. "Je suis quelqu’un qui prépare beaucoup de fiches", explique George au sujet de l’entretien programmé avec Snyder. "J’avais plein de documents, de questions potentielles, des choses pour parler de moi et de ce que j’aurais pu apporter au staff. Tout ça n’a servi à rien. Il me connaissait déjà. Et en profondeur. Ma personnalité, mes qualités, mes défauts. En fait c’était juste une formalité. Il appelait pour me dire ce que j’allais faire… J’ai ressenti la même émotion que lorsque je suis arrivé en Équipe de France, le même questionnement : suis-je au niveau ?"
Dans quelques semaines, Bryan George prendra la direction de la Géorgie pour y débuter une nouvelle vie. Son épouse a vidé la maison familiale de Lyon et l’installation aux Etats-Unis se fera au retour de la Coupe du Monde. Avec les Hawks, le Guyanais aura le titre de Directeur de la cellule DAV (Développement, Assistanat, Vidéo). A peine plus de dix ans après avoir obtenu son diplôme d’entraîneur région, la suite d’une folle ascension.